« Il parait que les personnes âgées se mettent à rapetisser et se tasser avec le temps. Je ne pensais pas que cela vous arriverait si vite. » par Ally Brynhild dans À force, cette baraque va finir par s'effondrer
Sujet: Re: Intrigue bonus ೨ Nord du nuage. Sam 6 Juil - 17:45
*I dreamed a dream*
You know that place between sleep and awake ?
A la vue de Mérida qui refusait de laisser partir Marianne, Ariel avait compris que ces deux-là étaient plus que des amies, elles étaient une famille. Si les sirènes en étaient capables, ses sœurs auraient-elles pleuré pour elle comme l'archère le faisait pour la princesse brune ? Clochette avait pleuré à son départ, elle en était certaine, l'ancienne sirène avait pleuré aussi. Et son père ? Le digne, fier et puissant souverain des océans aurait-il pleuré la mort de la plus jeune de ses filles ? Avait-il seulement ressenti de la tristesse à son départ ? Sans doute que non, les émotions étaient pour les femmes et les enfants à ses yeux, quelque chose qu'il réservait à ses filles et à Athela, leur grand-mère. Une bouffée d'amour monta en elle en repensant à la vieille sirène qui avait été comme une mère pour elle. Parfois elle l'entendait dans ses rêves quand elle avait peur. Athela aurait pleuré, si elle l'avait pu.
Et Eric ?
Elle avait mal à la tête aussi cessa-t-elle d'y penser. Ariel avait l'impression qu'on lui enserrait le crâne si fort, trop fort. C'était tellement douloureux qu'elle sentit les larmes lui monter, pourtant aucune ne coula. Elle n'arrivait même plus à pleurer, sa bouche était pâteuse. La chaleur était-elle plus forte ? Ariel haletait désormais, prenant à chaque fois de grandes bouffées d'air pour chasser la sensation d'engourdissement dans ses membres et se réveiller un peu.
Elle avait les yeux qui lui piquaient, comme si elle allait pleurer mais il n'y avait toujours pas de larme. Elle était sèche à l'intérieur, une simple sculpture de sable animée, voilà ce qu'elle était. La jeune fille n'était plus Ariel, princesse déchue d'Atlantica la perle de l'océan. Qu'était l'océan ? Il lui semblait que cette vaste étendue d'eau qu'elle revoyait dans ses souvenirs n'était qu'un mirage dans le désert. Elle n'avait jamais été sirène, seulement du sable et savait qu'elle redeviendrait sable très bientôt. A côté d'elle, Clopin avait les yeux fermés. La brunette pensa que c'était dommage, lui qui en avait de si beaux. Et puis le spectacle était magnifique. Elle entrelaça ses doigts avec ceux du gitan et posa sa tête sur son épaule. Ses yeux lui piquaient toujours, elle avait sommeil. La jeune fille décida de dormir un peu contre Clopin, elle était certaine que cela ne le dérangeait pas, il l'aurait repoussée sinon, mais il n'avait pas amorcé le moindre mouvement. Oui, dormir quelques minutes lui paraissait un bonne idée, ensuite elle pourrait peut-être essayer de réveiller l'artiste ambulant.
Et qui sait, la cage aura peut-être disparu et ils pourraient rejoindre le reste du groupe. La bête féroce qui les avait coursés plus tôt n'était plus nulle part, seule restait la dépouille de Marianne pouvant que l'animal avait bien existé. Mais peut-être que le corps était aussi un mirage, peut-être que la cage en était un ! Elle tendit faiblement la main pour savoir si le métal des barreaux était solide ou si comme elle le pensait ils n'étaient pas réels. Seulement elle était trop loin, elle ne pouvait atteindre leur prison, et elle ne voulait pas bouger. Elle était bien contre Clopin. De toute façon elle savait qu'elle avait raison, et puis si elle avait tort elle restait du sable : il lui serait aidé de se glisser entre les barreaux. Nul doute que le brun pourrait en faire autant, et dans l'esprit embrumé de la jeune fille il devint Eric. Son cœur fit un bon dans sa poitrine, il était là, il l'avait toujours été. Avec elle, occupant la place qui était la sienne depuis qu'elle l'avait rencontré. Qu'elle avait hâte de lui montrer qu'ils étaient sauvés, lui qui était resté avec elle depuis le début. Elle ne le remercierait jamais assez car elle savait qu'il serait là jusqu'à la fin.
Elle s'appuya davantage contre lui et ferma les yeux, le sourire aux lèvres. Ils étaient sauvés. Il serait tellement content, lui qui avait fait tout ce chemin pour la retrouver et la sauver comme elle l'avait fait le jour de leur anniversaire respectif. Peut-être était son anniversaire ? Une bouffée d'amour naïf et pur l'envahit, son prince l'aimait donc autant qu'elle l'aimait.
Le vent secoua ses longues boucles brunes et l'écho d'une voix qui ressemblait à celle de sa grand-mère souffla pour elle seule qu'elle ne devait pas avoir peur. Mais Ariel n'avait pas peur, elle était avec Eric et ils étaient sauvés. Il l'aimait. Sa respiration ralentit, elle s'endormit dans les bras du beau gitan qu'elle imaginait prince, une expression de bonheur éclairait son visage même lorsque son cœur cessa de battre, même quand elle cessa de respirer.
Elle était morte heureuse.
Ariel ouvrit brusquement les yeux et ses lèvres se tordirent en un cri silencieux. Elle inspira profondément une fois, deux fois, trois fois, et regarda autour d'elle. La jolie muette était de retour dans son lit, dans sa chambre, dans le château. Il n'y avait la moindre trace de sable, de sang et de sueur. Elle comprit soudain que tout cela n'avait été qu'un rêve. Il n'y avait jamais eu de Marianne, de bête féroce ni de cage. Pas de désert, pas de soleil brûlant. Pas de Clopin, pas d'Eric. Il ne l'aimait pas, n'était pas venu la sauver. Elle n'était pas morte dans ses bras. Elle n'était pas morte.
Un flot continu d'émotions contradictoires l'envahit, et l'ancienne sirène se mit à pleurer à chaudes larmes. Bien sûr elle était heureuse que tout cela n'ait été qu'on cauchemar, mais la partie égoïste d'elle lui soufflait qu'au moins son cher Eric l'avait aimée dans ce désert. Elle ferma les yeux pour occulter le monde extérieur. Elle ne voulait plus penser à rien, seulement aux bras du jeune prince autour d'elle. L'adolescente se calma, mais pleurait toujours un torrent de larmes. Elle n'ouvrirait plus les yeux avant que tout aille mieux et quand le lendemain on viendrait la réveiller elle demanderait si c'était enfin terminé, si elle pouvait ouvrir les yeux. Ariel rabattit toutes les couvertures sur elle et se recroquevilla dans son lit. Si c'était cela pleurer, pleurer réellement, alors elle préférait qu'on lui arrache le cœur.