« Il parait que les personnes âgées se mettent à rapetisser et se tasser avec le temps. Je ne pensais pas que cela vous arriverait si vite. » par Ally Brynhild dans À force, cette baraque va finir par s'effondrer
Sujet: Hero's journey (pv Zarina) Jeu 12 Fév - 10:57
Hero's journey
Yvain et Zarina
Ceux qui disent dormir comme un bébé, en général, n’en ont pas.
Il n'y avait rien de pire que d'avoir affaire à une demoiselle qui ne voulait pas être sauvée. À la réflexion, il y avait certainement pire et le chevalier était tombé dessus : une demoiselle qui, non seulement, ne voulait pas être sauvée par un inconnu (tout chevalier qu'il était) mais en plus était parfaitement capable de se sauver toute seule. Depuis qu'il était redevenu lui-même, Yvain s'était fixé comme objectif de redorer sa réputation ternie. Sous le nom de Don Quichotte, il avait fait honte aux siens et au royaume qu'il avait juré de servir. Bien que trouver le Graal semblait être le minimum pour avoir le droit de rentrer chez lui en gardant la tête haute, le chevalier errant répondait présent au moindre acte héroïque possible !
Un jour, il s'était précipité à la rescousse de ce qu'il estimait être un tableau classique : sauvez deux demoiselles de dangereux brigands. Yvain n'avait jamais su clairement établir qui avait sauver qui. Plus exactement, il y avait son point de vue et celui de cette Zarina. Pour le chevalier, il était évident que c'était son intervention (et celle de son lion) qui avait arrangé la situation... Sauf que Zarina ne démordait pas du fait qu'elle s'en sortait très bien avant leur arrivée. La naissance du bébé les avait empêché d'aller plus loin dans ce 'débat'.
Ensuite, l'heureux événement prit des tournures plus sombres avec la perte de la mère. Ce détail l'affectait plus que n'aurait dû le faire la perte d'une vie inconnue car cette perte soulevait beaucoup de chose dans le cœur du chevalier. Il avait échoué. Encore. Cependant, il reprit bien vite du poil de la bête, la tristesse laissant place à une détermination farouche. Au moins, pour ce cas-là, il n'était pas trop tard pour se racheter. Yvain avait très vite décrété qu'il accompagnerait l'ancienne fée jusqu'à Camelot pour respecter la dernière volonté de la dame qu'il n'avait pas réussi à sauver. Un serment qu'il reformula sur la tombe de fortune faite à la défunte.
A ce sujet, le chevalier avait hésité avant de reprendre la route en compagnie de Zarina et du bébé. N'était-il pas préférable de porter le corps de la dame afin qu'elle reçoive un enterrement décent auprès des siens ? Un but honorable qui se heurta bien vite à la dure réalité : il était impensable de faire une si longue route en compagnie d'un cadavre. Même lui devait se rendre devant un argument aussi sensé.
Pourtant, laissé derrière eux cette demoiselle dans ce trou creuser à la hâte ne fut pas un acte fait de gaieté de cœur. Seulement, il était impossible de se laisser aller au moindre sentiment proche de la culpabilité quand on voyageait en compagnie d'un bébé et, çà, Yvain l'avait rapidement découvert. Un nouveau cri du poupin brisa (pour au moins la dixième fois) le silence de leur voyage.
"Qu'y a-t-il cette fois ?" Demanda le chevalier en se tournant vers Zarina qui portait le chérubin.
Loin d'être agacé, c'était l'inquiétude qui était perceptible dans cette question qu'Yvain posait inlassablement à chaque fois qu'il estimait que quelque chose clochait chez le bébé. Les jérémiades du bambin ne semblaient pas au goût de son lion alors le chevalier passa une main dans la crinière de son compagnon de route en le caressant comme s'il s'agissait d'un chien et non d'un dangereux fauve.
"Courage, compère." Lui souffla-t-il en se penchant vers l'animal comme si le compère en question pouvait le comprendre.
Ensuite, il s'approcha du bébé en pleurs. Il fut un temps où Yvain s'était tracassé sur le fait d'être père un jour. Seulement, cette pensée datait d'une période aussi éloignée qu'heureuse lorsqu'il n'était encore qu'un jeune marié. Il était loin de se douter que ce genre des interrogations du genre 'pourrais-je m'occuper d'un enfant' allait revenir au centre de ces préoccupations à la suite d'une aventure. "Est-ce qu'il a faim ? Soif ?" S'inquiéta-t-il en regardant la source de ses inquiétudes. Puis il recula d'un pas alors qu'une horrible possibilité lui vint à l'esprit. "Il ne doit pas encore être changé, j'espère ?! Votre tenue va devenir à la limite de l'indécence si vous sacrifiez encore le moindre morceau de tissu."
Ceux qui disent dormir comme un bébé, en général, n’en ont pas.
Il n'y a pas d'amour, sans confiance en soi, il n'y a pas de joie, sans rire, il n'y a pas de camaraderie, sans respect. Zarina avait appris à survivre dans ce monde qui ne la voulait pas d'elle telle qu'elle était. Comme une pièce, un côté fée et un côté pirate. Il fallait savoir que tout ce qu'elle voulait, s'était d'être accepté, rien de plus rien de moins. Ces années de service auprès de Crochetlui avaient appris à être plus sûres d'elle, à exprimer ses idées sans avoir peur de blesser. Elle pensait que pour avoir une place, il fallait se faire, entendre et non espérer qu'un beau jour, ses proches ouvrent les yeux. De toute façon, les fées ne l'avaient jamais comprise, à tel point qu'elle avait perdu ses ailes. Zarina ne comptait pour personne, elle était seule, enfin, elle l'avait été durant quelques heures, avant de faire la rencontre d'une noble enceinte.
Qui pouvait se douter que son destin la conduisît ici ? Que grâce à ces prochaines actions, elle pourrait retrouver tout ce qu'elle a toujours voulu ? Être accepté parmi les siens. Pour le moment, elle ne voyait qu'un moyen d'obtenir de l'argent et pouvoir subvenir à ses besoins durant quelques semaines. La jeune noble lui avait tout de suite faite confiance, chose étrange, quand on voyait la dégaine de Zarina. Elles avaient échangé quelques mots et comme prédit, elles se firent attaquer par les brigands qui avaient poursuivi la future mère. La pirate s'était farouchement battue, même si un chevalier et un lion étaient venus lui prêter main-forte. S'il n'avait pas précisé qu'il était venu à sa rescousse, cela aurait pu bien se passer, mais cette phrase eut le don d'énerver l'ancienne fée, elle était capable de se débrouiller toute seule. Ce fut l'accouchement tragique et la promesse de mettre à l'abri l'enfant parmi les siens, qui l'obligea à supporter davantage la compagnie de ce beau parleur.
C'était la première fois que Zarina portait un bébé, ce n'était pas dans la vallée des fées ou dans le bateau de crochet, qu'elle aurait pu en croiser. Au début, elle avait peur de le casser, il semblait si petit, si fragile. Oui, c'est bien une ancienne fée qui pensait cela, mais finalement, elle s'était habituée à l'avoir dans les bras, à l'entendre pleurer. Ce petit homme ne semblait jamais content et il fallait l'avouer voir que ce satané lion et son maître n'aimaient pas les pleurs, la mettait de bonnes humeurs. Sérieusement, elle, besoin d'être sauvé ? Qui pouvait bien être sa bonne fée la marraine pour lui mettre ce genre d'idée dans la tête ?
"Qu'y a-t-il cette fois ?"
Le petit chevalier, le nom qu'elle lui avait donné, pleurait à nouveau. Elle avait beau le bercer rien n'y faisait et ce n'était pas en répondant à la question d'Yvain que cela allait calmer le petit.
"Est-ce qu'il a faim ? Soif ? Il ne doit pas encore être changé, j'espère ?! Votre tenue va devenir à la limite de l'indécence si vous sacrifiez encore le moindre morceau de tissu."
Ce fut la remarque de trop, ce chevalier ne savait pas se stopper au bon moment. Zarina s'offusqua. Si elle n'avait pas eu le bébé dans les bras, elle aurait donné une bonne correction à cet homme, comme elle l'avait fait si souvent sur le bateau de crochet, l'ancienne fée était la pro des baffes.
- De l'indécence ? Les hommes auraient le droit de se montrer torse nus, mais de voir une petite parcelle de peau chez une femme, serait indécent. Libérant une de ses mains, elle tira sur un des bouts de sa jupe, faisant apercevoir la peau de sa jambe et le défia du regard. Est-ce mieux ainsi ?
Zarina se fichait de sa tenue vestimentaire, tout ce qu'elle voulait à ce moment précis, c'était de comprendre le petit chevalier. Dans sa tête, elle retraçait ses dernières heures et ne voyait pas ce qu'elle pouvait faire de plus pour le bébé.
- Il n'a pas besoin d'être changé, et il a mangé il y a peu de temps. Il nous faudrait une certaine poussière magique qui le ferait dormir, mais je suppose que vous n'en disposez pas ?
Ceux qui disent dormir comme un bébé, en général, n’en ont pas.
En tant que chevalier, Yvain avait affronter bien des dangers et combattu de nombreux ennemis. Pourtant, il se retrouvait complètement démuni devant un bébé en pleurs. Si Zarina osait le taquiner sur ce point, il avait, heureusement, une excuse toute trouvée : aucun code de la chevalerie ne préparait à ce genre de rencontre.
Et aucun code de la chevalerie ne préparait non plus à rencontre une demoiselle qui ne voulait pas être sauvée. Rencontre une femme maîtrisant aussi bien l'épée que lui était aussi déstabilisant que la présence du petit être qu'elle tenait dans ces bras. Le chevalier au lion se retrouvait donc très loin de sa 'zone de confort' en accompagnant la fée pirate et le nourrisson jusqu'à Camelot. D'autres que lui auraient certainement trouver une excuse pour passer son chemin. Sauf qu'Yvain était particulièrement obstiné lorsqu'il s'agissait de promesse à tenir. L'honneur des chevaliers de la table ronde qu'il représentait avait déjà prit un sacré coup dans l'aile avec ces aventures en tant que Don Quichotte, hors de question de rajouter la lâcheté à la liste ! Qui plus est, il avait déçu tout le monde à cause d'une promesse brisée. Cela représentait une motivation de premier choix pour être déterminé à ne plus jamais manquer à sa parole.
Voilà au moins là... Dixième fois au moins que le bébé pleurait. Son lion et lui n'aimait pas les pleurs pour deux raisons différentes. C'était certainement le bruit qui agaçait son compagnon de route. Quant à Yvain, lui était inquiétait au moindre cri provenant du bambin. Ce petit être avait l'air si fragile... Après avoir calmé son lion, le chevalier fit la liste des causes possible qui pouvait justifier des larmes de la part du bébé. Tout semblait prétexte à pleurer, mais, dans cette liste, Yvain espérait qu'il ne s'agissait pas de tissu à changer, car il jugeait la tenue de Zarina déjà suffisamment dépareillée comme çà !
- De l'indécence ? Les hommes auraient le droit de se montrer torse nus, mais de voir une petite parcelle de peau chez une femme, serait indécent. Est-ce mieux ainsi ?
Yvain détourna le regard devant la provocation de son interlocutrice et recula même d'un pas. Il n'était pas pudique, mais avait surtout peur de ce que les gens pouvaient conclure avec la tenue qu'il catalogua arbitrairement de provocante de la fée pirate.
"Inutile de vous offusquer pour si peu !" Commença-t-il surpris que Zarina prenne la mouche pour si peu. Par mesure de sécurité, il garda son regard détourné. "Il se trouve que je suis marié. J'aime ma femme !" Comme preuve ultime de cette déclaration, Yvain osa regarder de nouveau l'ancienne fée en face pour lui montrer une bague qu'il gardait précieusement autour du cou grâce à une chaîne. "Et je voudrais simplement éviter que les personnes que nous pourrons éventuellement croiser sur la route ne s'imagine des choses en nous voyant ensemble, surtout avec vous dans cette tenue."
Bon d'accord, ils se trouvaient tous au beau milieu de la forêt. Le risque était donc très faible de croiser quelqu'un qui ne soit pas un bandit. Encore plus faible de voir une personne le connaissait assez pour savoir qu'il était marié et qui serait prompte à conclure rapidement certaines choses. Cela faisait un peu trop de 'si' et de 'peut-être' pour être réalisable. Pourtant, Yvain jugea qu'on était jamais trop prudent. De toute façon, la priorité était de calmer le bébé, aussi laissa-t-il cette inquiétude de côté pour l'instant.
- Il n'a pas besoin d'être changé, et il a mangé il y a peu de temps. Il nous faudrait une certaine poussière magique qui le ferait dormir, mais je suppose que vous n'en disposez pas ?
Se fut au tour du chevalier de se retrouver quelque peu piqué au vif.
"Bien sûr que je n'en ai pas ! Et de toute façon, il doit bien avoir un autre moyen que la poussière magique dont vous parlez pour le calmer."
Certes, il ne connaissait rien en matière de bébé, mais son instinct lui soufflait que ce n'était certainement une bosse chose de mettre le bambin en contacte avec quoi que se soit de magique. Yvain se croisa la tête pour trouver une autre solution. À le voir aussi concentrer, on aurait pu croire qu'il réfléchissait au meilleur moyen de sauver le monde ou une entreprise aussi importante, en tout cas. Ce n'était pas à manger. Il ne fallait pas le changer. Que restait-il ? Difficile de se concentrer avec tout ce bruit !
"Je sais !" S'exclama-t-il. "Donnez-le moi."
Son enthousiasme d'avoir peut-être trouvé la solution s'étiola lorsqu'il fallait passer à la pratique. Entre réticence et geste incertain, le résultat fut d'empirer les pleurs du bébé au lieu de le calmer. Yvain n'étant pas du genre à abandonner aussi facilement, il essaya de reproduire les gestes que faisait Zarina pour le bercer et tenta même de chanter un début de berceuse dont il se souvenait.
"Re... Reprenez-le dans vos bras." Finit-il par dire en s'interrompant après quelques mesures. Yvain retendit le bébé en direction de l'ancienne fée comme s'il s'agit d'un objet en porcelaine qui menaçait de s'effriter sous ses doigts à tout instant. "A la réflexion, une voix féminine, le rassurerait beaucoup plus."